jeudi 16 juillet 2015

ALAIN BARSAMIAN - Peintre-graphiste-photographe ...

A première vue, ces graphismes relèvent de la fulgurance pure. On les perçoit comme les projections mentales de foudres faisant éclater sur la toile l’éphémère signe de leur énergie. Ici, le travail n’est que préparatoire, mise en train, quête du rythme jusqu’au moment où le geste devient mûr, où la chose advient, tourne à plein régime. Comme dirait Picasso, peindre, c’est découvrir ce qu’on est en train de chercher. A peine la machine créatrice a-t-elle trouvé sa voie, que le courant passe entre l’homme émetteur et la toile réceptrice. Une affaire de couple en somme. Mais une affaire plus électrique qu’esthétique. Plutôt geste primitif qu’acte conscient. On est au cœur battant de l’instinct. Au moment où l’apprentissage se perd, où l’artiste s’oublie, où l’homme extrait de son fonds obscur un éclat flagrant de sa joie. Fulgurance pure, car Alain Barsamian a la chance d’être aujourd’hui toujours aussi ignoré des circuits classiques de l’art qu’en ses débuts. Son travail n’est pas perverti par une cote à maintenir ou à conquérir. Son geste n’est pas troublé par la répétition d’un tic esthétique qui plaît et qui se vend ou se prostitue. Il n’est pas d’aucune école, ne se réclame d’aucun maître, n’est le suiveur de personne. Bien sûr, ses toiles peuvent renvoyer à Hans Hartung, à Mathieu, à l’abstraction lyrique. Mais alors, appliquer ce genre de grille sur du Barsamian, c’est troubler la pureté d’une démarche quasi paléolithique, d’avant les figurations académiques. Car ce peintre est fou qui déploie pour nous en figures fugaces et figées, les irruptions pressantes surgies de nos profondeurs.

Né en 1947, Alain Barsamian a toujours alterné exercices et silences, dessinant, peignant, usant de la plume ou de l’appareil photographique pour rester éveillé, ouvert, actif.

Avec un grand-père et un père faisant carrière comme chirurgiens dentistes, sa vie semblait toute tracée. Mais ce même grand-père ayant la passion de la photographie, vers l’âge de 10 ans, le jeune Alain s’essaie à la prise de vue et baigne dans la chambre noire. Avec lui, la photographie fait œuvre de révélation, à la lueur des ampoules inactiniques d’un laboratoire de fortune installé dans un cagibi au fond du couloir de leur appartement parisien. A l’école, seul le dessin l’intéresse. Puis vient la gouache et le papier qu’il achète chez un marchand du quartier dont il devient le plus fidèle client. La patronne lui laisse carte blanche pour  fouiner dans les moindres recoins du magasin. Il est constamment à la recherche d’un nouvel outil ou d’un ingrédient digne d’être mis à l’épreuve.

En 1965-66, réussissant à contrer les exigences paternelles, Barsamian se prépare au concours d’entrée des Arts décoratifs de Paris à l’atelier Guillaume Met  de Penninghen, dans le quartier de St Germain des Prés. Son échec l’oblige à suivre la voie voulue par le père. Malgré tout, il restera marqué par son année d’atelier. Et pour conjurer, le sort il court chez son papetier pour acquérir toiles et tubes de peinture à l’huile. De retour, utilisant le chevalet sur lequel il a vu son père s’essayer à des peintures figuratives, il vide ses tubes et remplit sa toile au couteau et à l’automatisme. D’autres suivront, comme s’il habitait enfin la gestuelle et la spontanéité qui n’allaient plus le quitter. Esprit du temps, il fait de l’abstraction lyrique sans le savoir et sans même connaître ce mouvement. Il dira à ce propos : « Ces lignes que je traçais d’une façon naturelle et purement instinctive devenaient avec le temps de plus en plus stylisées, et puisque ce graphisme me convenait, je l’ai adopté comme une écriture ».

En 1980, sa rencontre avec le peintre Guy Bertholon sera déterminante. Elle coïncide avec l’opportunité d’une première exposition personnelle à Cergy Pontoise prévue pour mai 1982. Barsamian s’y prépare assidûment et réussit son pari. A cette occasion, Guy Bertholon écrira : «  Alain Barsamian est à l’aube d’une carrière de peintre authentique, s’il ne gaspille pas son talent ». Mais l’année suivante, Barsamian s’expatrie en Bretagne avec sa famille. Installé dans le Morbihan, il intègre le cercle des peintres professionnels qu’il côtoie, cherchant un juste équilibre entre exigences esthétiques et nécessités du quotidien. Après quelques expositions ici ou là de vingt années de travail, vient le trou noir, avec le manque, des reprises incertaines et le décès de son épouse.

Il refait surface dans le sud, se remarie puis devient veuf pour la seconde fois. Mais Barsamian se sauve dans la peinture. Et s’il s’expose depuis septembre 2014 dans une galerie à  Saint Paul de Vence, c’est montrer que son geste toujours aussi fulgurant est le gage d’une jeunesse intacte.

Denis Donikian






Graphismes illustrant les Aphorismes de Denis Donikian


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GRAPHISMES    127   0,21m X 0,30m encre acrylique sur papier

GRAPHISMES    135   0,15m X 021m Encre acrylique sur papier

GRAPHISMES    087   0,21m X 0,15m encre acrylique sur papier

GRAPHISMES    119   0,15m X 021m Encre acrylique sur papier

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GRAPHISMES    006  0,32m X 0,50m Encre acrylique sur papier Montval Canson


4 commentaires:

  1. Alain c'est un artiste unique, hors du commun !
    Heureux ceux qui le connaissent et ont vu ses couleurs fulgurantes.

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  2. Sa peinture est belle mais je craque pour ses photos....sublimes !

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