samedi 20 septembre 2014

Editorial - Harout Sassounian

Harout Sassounian

Harut Sassounian 
The California Courier 
Éditorial du 11 septembre 2014 
www.TheCaliforniaCourier.com

Bien que fédérer les Arméniens autour d’un ensemble commun de revendications restitutives ne soit pas une tâche aisée, il est primordial de le faire à la veille du centenaire du génocide arménien.
Il est impératif que les Arméniens parlent d’une seule voix, pour dire au monde ce qu’ils exigent exactement de la Turquie, car des demandes divergentes enverraient un message confus. Certains Arméniens se satisferaient d’une simple reconnaissance du génocide et des excuses du gouvernement turc. D’autres souhaitent des compensations financières, l’ouverture des frontières, l’accès à la mer Noire et la restitution du Mont Ararat. Les maximalistes, dont fait partie votre auteur, demandent tout ce que les Arméniens ont perdu pendant le génocide : des compensations pour les meurtres de 1,5 million d’Arméniens ainsi que la restitution des biens, des comptes en banque, des églises, des écoles, des cimetières et des territoires de l’Arménie occidentale. Dans des précédents articles, j’avais recommandé d’utiliser un terme général – exiger la justice – pour résumer toutes les demandes arméniennes présentées à la Turquie.
Être un « maximaliste » implique non seulement de revendiquer tout ce que les Arméniens ont perdu, mais également d’user d’une stratégie de négociations optimale. Pourquoi demander le minimum et obtenir encore moins à la fin ? Ne serait-il pas plus sage de commencer par des exigences maximales et de conclure le meilleur marché possible ?
Ces pensées m’ont traversé l’esprit tandis que je lisais le commentaire très bien écrit du ministre arménien des Affaires étrangères, publié dans Le Figaro la semaine dernière : « La Turquie doit se réconcilier avec son propre passé ». Il a correctement qualifié de « trompeuses » et d’ « artificieuses » les notions de « douleur commune » et de « mémoire juste » utilisées par le président Erdogan et d’autres responsables turcs se référant au génocide arménien. Nalbandian a également rejeté la proposition turque d’établir « une commission d’historiens afin de dégager la vérité » sur le génocide arménien. Malheureusement, cette proposition sinistre a été incluse dans les protocoles Arménie-Turquie de 2009, que le ministre des Affaires étrangères continue de soutenir dans son commentaire. En outre, au lieu de simplement fustiger la Turquie pour sa négation du génocide arménien et demander une « réconciliation » passant par « la reconnaissance et la condamnation du génocide », le ministre des Affaires étrangères aurait dû exiger une « justice » qui inclurait toutes les demandes arméniennes.
À la fin de son commentaire profond, Nalbandian a rappelé aux lecteurs du Figaro que le président Sarkissian avait invité le président Erdogan « à se rendre en Arménie le 24 avril 2015, à l’occasion des commémorations du centième anniversaire du génocide arménien. Nous formulons sincèrement le vœu que cette opportunité ne soit pas manquée et que le président turc sera bien à Erevan ce jour-là. »
De toute évidence, l’Arménie essaie de mettre le président turc dans une situation difficile : soit il rejette l’invitation, donnant une mauvaise image de lui aux yeux du monde, soit il se rend en Arménie le 24 avril 2015 et il reconnaît le génocide arménien.
Pour mener à bien son schéma habile, le ministre des Affaire étrangères d’Arménie a fait la démarche inhabituelle de venir assister à la cérémonie d’investiture du président Erdogan le 28 août pour lui remettre l’invitation officielle du président Sarkissian. La visite de Nalbandian à Ankara est survenue juste après qu’Erdogan a insulté les Arméniens en se plaignant à la télévision turque que certains l’avaient traité de Géorgien et « pire encore, d’autres m’ont traité d’Arménien. »
Je doute fort qu’Erdogan vienne à Erevan pour le centenaire du génocide arménien. S’il ne le fait pas, les responsables arméniens seront ravis de constater que leur stratagème a fonctionné, faisant apparaître Erdogan comme un obstructionniste. Mais, que se passera-t-il si le président turc vient à Erevan le 24 avril 2015 ? Erdogan pourrait dire et faire un certains nombre de choses bizarres, mais c’est un politicien astucieux qui peut aisément éviter le piège arménien et retourner la situation aux dépens de ses hôtes. Il pourrait se rendre au Mémorial du Génocide à Erevan et annoncer qu’il est venu pour « partager la douleur » de toutes les victimes de la Première Guerre mondiale, y compris les Turcs et les Arméniens. Ce serait un beau coup de relations publiques pour Erdogan !
Pas plus tard que la semaine dernière, Erdogan a pris position contre l’Arménie lors de sa visite en Azerbaïdjan. Il a dit au président Aliyev (pour la millième fois) que la Turquie n’ouvrira pas sa frontière avec l’Arménie, tant que cette dernière ne se sera pas retirée du Karabagh (Artsakh). Le Premier ministre turc récemment élu, Ahmet Davutoglu, et le ministre des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, ont fait eux aussi des déclarations anti-arméniennes violentes. En retour, le président Aliyev a promis d’aider la Turquie à ‘révéler le génocide arménien fictif’.
Il est clair que la Turquie et l’Azerbaïdjan intensifient leur rhétorique et leurs initiatives communes contre l’Arménie au lieu de chercher la réconciliation. Dans ces circonstances, l’Arménie devrait adopter une position tout aussi dure contre les deux États turciques, en commençant par retirer immédiatement la signature de l’Arménie des protocoles Arménie-Turquie.
©Traduction de l’anglais C.Gardon pour le Collectif VAN – 11 septembre 2014 –www.collectifvan.org

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